Les oligarques "priés" de payer la relance.

[Baptiste]

Les oligarques russes priés de payer la relance

Par Pierre Avril

Ils sont notamment sommés par Vladimir Poutine d'investir dans Sotchi 2014.

Sauvés de la déroute financière par Vladimir Poutine, les oligarques russes, désormais refaits, sont invités par le premier ministre et homme fort du pays à participer à l'effort de relance économique nationale.

Dernier exemple en date, Viktor Vekselberg, treizième fortune de Russie selon le classement du magazine Finans (6,2 milliards d'euros en 2010), vient d'être chargé par le Kremlin de superviser la création, dans les environs de Moscou, d'une Silicon Valley à la russe. Ce projet est destiné à «moderniser» le pays, en lui permettant de réduire son addiction au gaz et au pétrole. Et voici ce magnat des matières premières, à l'image de ses riches collègues, converti dans les technologies de l'information.

Le nom de son camarade, Roman Abramovitch, troisième fortune nationale et propriétaire du club de Chelsea, est par ailleurs cité pour diriger un Conseil des sports. Selon le quotidien économique «Vedomosti», il serait aidé dans sa tâche par le président de Gazprom, Alexei Miller, et son homologue des Chemins de fer russe, Vladimir Iakounine, un proche de Vladimir Poutine.

Dans la perspective des Jeux d'hiver de Sotchi 2014, le sport est érigé en autre cause nationale. Afin de transformer la station de la mer Noire, adossée aux monts du Caucase, en vitrine du sport alpin, les oligarques ont commencé à investir une partie de leur fortune dans la construction d'hôtels et de stations de ski. Routes, liaison ferrée, équipements sportifs, tout y est à construire.

Quête d'argent frais à investir
Outre les entreprises publiques Gazprom et Sberbank, y sont présents le leader mondial de l'aluminium Rusal, Oleg Deripaska (10,4 milliards d'euros), et son collègue d'Interros, Vladimir Potanine (7,4 milliards d'euros), fan de ski.

En quête d'argent frais à investir à Sotchi ou dans le Caucase, le gouvernement songe même à «rapatrier» en Russie des milliardaires autrefois indésirables, tels que Telman Ismaïlov, parti construire des palaces en Turquie, ou Mikhaïl Goutseriev, dont la compagnie pétrolière Roussneft avait été cédée, sous la pression, à un proche de Poutine.

Que les oligarques russes financent le développement de leur pays est tout à fait naturel aux yeux du premier ministre. Dans la foulée de la dissolution de l'URSS, ces derniers ont fait fortune en mettant la main sur des actifs bradés par le pouvoir, ou plus tard, en se plaçant dans le sillage de Poutine.

Durant la dernière crise financière, l'État a mobilisé ses ressources budgétaires et bancaires pour voler au secours des oligarques, en espérant que ces derniers lui seront redevables de son geste. Récemment, le chef du gouvernement a menacé de sanctionner financièrement Vladimir Potanine et Mikhaïl Prokhorov pour avoir sous-investi dans la production énergétique, alors même qu'ils s'étaient «procuré leurs actifs pour des kopeks».

À l'égard du premier clan des oligarques, «Poutine se comporte comme un père aimant, tout en grondant ses enfants», explique Tatiana Stanovaïa, experte au Centre des technologies politiques. Que Gazprom soit amené, sur commande du pouvoir, à construire une station de ski, peut sembler défier les lois du management moderne. Et amène parfois les milliardaires russes à traîner des pieds, surtout lorsque l'investissement semble hasardeux. Mais, jusqu'à présent, aucun d'entre eux n'a refusé de s'exécuter.

Source : Figaro