Plaidoyer pour la hiérarchie par Nietzsche
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Plaidoyer pour la hiérarchie par Nietzsche
« Dans toute société saine, se détachent, tout en se conditionnant réciproquement, trois types physiologiques soumis à des gravitations physiologiques différentes, dont chacun a son hygiène propre, sa sphère de travail, son propre mode de perfection et de maîtrise. C'est la Nature (...) qui sépare ceux qui vivent avant tout par l'esprit, ceux dont la force est dans les muscles et le tempérament, et ceux, de la troisième catégorie, qui ne se distinguent ni d'une manière ni d'une autre, les médiocres : ces derniers constituant la majorité, les premiers l'élite. La caste supérieure - que j'appellerai « le petit nombre » -, en tant qu'elle est parfaite, possède les privilèges accordés au petit nombre : entre autres, celui de figurer le bonheur, la beauté, la bonté sur terre. Seuls les hommes les plus doués d'esprit ont droit à la beauté, au beau en général : il n'y a que chez eux que la beauté ne soit pas faiblesse. Pulchrum est paucorum hominum : le bien est un privilège. Par contre, il n'est rien que l'on puisse moins leur passer que de vilaines manières, ou un regard pessimiste, un œil qui enlaidisse tout - ou même de s'indigner de l'état général des choses. L'indignation est l'apanage du tchandala : de même pour le pessimisme. « Le monde est parfait » - ainsi parle d'instinct cette élite de l'esprit, l'instinct qui dit oui : « l'imperfection, tout ce qui est au-dessous de nous, les distances, la passion de garder ses distances, le tchandala même, tout cela relève de la même perfection ». Les hommes supérieurs par l'esprit, qui sont les plus forts, trouvent leur bonheur là où d'autres trouveraient leur perte : dans le labyrinthe, dans la dureté envers soi-même et les autres, dans l'épreuve ; leur plaisir est de se dominer ; l'ascétisme devient chez eux nature, besoin, instinct. La tâche la plus malaisée est à leurs yeux un privilège, se jouer de fardeaux qui écrasent les autres, un délassement... (...) Ils sont l'espèce humaine la plus digne de respect : cela n'exclut pas qu'ils soient la plus gaie aussi, la plus aimable. Ils règnent, non parce qu'ils veulent, mais parce qu'ils sont : ils ne sont pas libres d'être les seconds. Les seconds : ce sont les gardiens de la loi, les serviteurs de l'ordre et de la sécurité, ce sont les nobles guerriers, c'est avant tout le roi, image la plus haute du guerrier, du juge, et du mainteneur de la loi. Les seconds sont « le pouvoir exécutif » des seigneurs de l'esprit, ceux qui les approchent de plus près, ceux qui font à leur place tout ce qu'il y a de grossier dans le métier de régner - ils sont leur suite, leur bras droit, leurs meilleurs disciples. Dans tout cela, répétons-le, pas le moindre arbitraire, rien de « factice » ; c'est ce qui est autre qui est factice - et qui détruit la nature... L'organisation des castes, la hiérarchie, ne fait que formuler la loi suprême de la vie : la stricte séparation des trois types est nécessaire pour maintenir la société, pour permettre des types toujours plus élevés, jusqu'au type suprême : l'inégalité des droits est la condition nécessaire pour qu'il y ait des droits. Un droit est toujours un privilège. Chacun, à sa manière, à son propre privilège. Ne sous-estimons pas les privilèges des médiocres. Plus on se rapproche des cimes, plus la vie devient dure - le froid augmente, la responsabilité augmente. Une haute civilisation est une pyramide : elle ne peut reposer que sur une large base, elle a pour condition préalable l'existence d'une médiocrité saine et aux assises solides. L'artisanat, le négoce, l'agriculture, la science, la plus grande partie de l'art, bref, tout ce que recouvre la notion d'activité professionnelle, ne peut se concilier qu'avec une médiocre moyenne de capacités et d'aspirations : cela serait déplacé parmi les exceptions, l'instinct qui y convient s'opposerait aussi bien à l'aristocratisme qu'à l'anarchisme. Avoir une utilité publique, être rouage, exercer une fonction, c'est là une destination naturelle (...). Pour le médiocre, être médiocre un bonheur : la maîtrise dans une chose, la spécialisation est un instinct naturel. Il serait tout à fait indigne d'un esprit un peu profond de trouver à redire à la médiocrité en soi. Elle est même une nécessité primordiale pour qu'il puisse y avoir des exceptions : c'est d'elle que dépend toute haute culture. Si l'homme d'exception manie précisément les médiocres d'une main plus douce que lui-même et ses pairs, ce n'est pas seulement par politesse du cœur, c'est tout simplement son devoir... Qui sont, parmi la canaille d'aujourd'hui, ceux que je hais le plus ? La canaille socialiste, les apôtres tchandala, qui minent l'instinct, le plaisir, la modération du travailleur satisfait de sa modeste existence, ceux qui le rendent envieux, qui lui enseignent la vengeance... L'injustice n'est jamais dans l'inégalité des droits, elle est dans la prétention à des droits égaux. »
Friedrich Nietzsche, /L'Antéchrist/.
Friedrich Nietzsche, /L'Antéchrist/.
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